Fragments d’un discours interrompu

Événement bienvenu de tous et longuement attendu, l’inauguration de la « halle alimentaire » du 10e arrondissement, portée par la jeune entreprise d’ESS Kelbongoo, a enfin été célébrée jeudi dernier 12 octobre en présence de
– Rémi Féraud, sénateur-maire du 10e arrondissement ;
– Elise Fajgeles, députée de la 5e circonscription et conseillère d’arrondissement ;
– Olivia Polski, maire-adjointe de Paris chargée du Commerce et de l’Artisanat, élue du 14e arrondissement ;
– Antoinette Guhl, maire-adjointe de Paris chargée de l’Économie sociale et solidaire, élue du 20e arrondissement ;
– Didier Le Reste, conseiller de Paris, délégué à la politique de la ville ;
– Paul Simondon, premier adjoint au maire du 10e arrondissement chargé de l’Urbanisme ;
– Hélène Duverly, maire-adjointe du 10e arrondissement chargée du Commerce et de l’Artisanat ;
– Jacques Larouzée, directeur territorial nord-est chez Paris Habitat
… et j’en passe (avec pourtant un coucou, parmi les personnes fondues dans la foule, à Léa Vasa, maire-adjointe elle aussi et l’un de nos premiers interlocuteurs à la mairie du 10e, à Camille Arnodin et Charly Ferret, de l’équipe d’animation du Conseil de quartier Hôpital Saint-Louis / Faubourg du Temple, aux représentants des mobilisations citoyennes dans le 3e [Groupe des 24.000] et le 20e [association Carton rouge] venus fêter l’événement avec nous, et à Dominique Monin de la Librairie Les Nouveautés et Daniel Max de l’association ETM, déjà installés dans d’autres locaux de l’immeuble Bichat-Temple).

La première à prendre la parole était Léa Barbier, co-fondatrice de Kelbongoo, qui a bien voulu nous communiquer son discours pour publication sur ce blog :

Nous inaugurons aujourd’hui la première expérimentation de halle alimentaire parisienne. Kelbongoo a donc aujourd’hui la chance d’incarner l’une des expérimentations. C’est pour nous l’aboutissement de quatre ans de travail intense pour construire ce projet, et il s’agira de notre troisième point de distribution, les deux autres étant situés dans le 20e, au métro Télégraphe et dans le quartier Saint-Blaise, métro Maraîchers.
Cette halle alimentaire est l’aboutissement d’une convergence entre le travail de Kelbongoo, la mobilisation d’un collectif d’habitants du 10e, Stopmonop, qui voulait voir s’installer cette halle alimentaire dans leur quartier, et celles de nombreux élus du 10e qui se sont battus pour la voir naître.
Kelbongoo est une entreprise sociale, dont l’objectif est, d’une part, de démocratiser l’accès à des produits fermiers frais, locaux et de qualité, par des prix à la portée du plus grand nombre, d’autre part, de soutenir les producteurs locaux, à qui nous reversons 77 % du prix de vente. Nous sommes le seul intermédiaire entre producteurs et consommateurs. C’est donc une logique de circuit court mais aussi de commerce équitable.
Kelbongoo se charge de la partie logistique, distribution et communication, notamment du transport, de la préparation des commandes, de la distribution auprès des consommateurs.
Nous venons cet été avec l’équipe de franchir un grand cap, avec l’ouverture d’un entrepôt à Montreuil où se fait la préparation des commandes, afin de pouvoir fournir nos trois points de distribution, dont la halle alimentaire de la rue Bichat.

Les grands objectifs de Kelbongoo :

  • opérer une reconnexion entre milieu rural et milieu urbain, entre producteurs de Picardie et habitants du 20e et du 10e;
  • permettre aux consommateurs de retrouver une vraie traçabilité dans les produits qu’ils achètent, une transparence sur les pratiques de production des producteurs et une transparence sur les prix, sur la répartition des marges et de la valeur ajoutée ;
  • permettre aux gens de se réapproprier leur alimentation et de comprendre l’impact de leur consommation sur l’environnement et la santé ;
  • soutenir une agriculture paysanne, des petites et moyennes exploitations locales qui :
    1) sont créatrices d’emploi en milieu rural

    2) ont des pratiques respectueuses de la terre, des bêtes et des hommes
    3) recherchent le goût et la qualité avant tout pour leurs produits ;
  • permettre à ces producteurs d’accéder aux débouchés urbains tout en conservant un prix rémunérateur et une charge de travail allégée grâce à notre organisation logistique;
  • contribuer à la démocratisation des produits fermiers, en nous implantant dans les quartiers populaires et mixtes de Paris et en mettant en place des partenariats comme celui noué avec le centre social Saint-Blaise pour permettre de subventionner les paniers Kelbongoo de familles adhérentes du centre grâce au financement de l’association Ernest.

Kelbongoo s’inscrit dans le mouvement de l’économie sociale et solidaire. En l’occurrence, l’enjeu est de reconquérir un secteur marchand, celui de l’alimentation, pour s’extraire des objectifs de profit d’une entreprise classique et insuffler des valeurs et objectifs sociaux à ce secteur. Ce secteur est crucial puisqu’il touche à des questions de santé et d’environnement de par son lien à notre alimentation et notre mode de production agricole.
Nous essayons donc de créer une alternative, à notre petite échelle, comme beaucoup d’autres initiatives en circuit court qui se développent partout en France. Une alternative notamment au système agro-alimentaire, qui est un mode de production industrielle qui repose sur la grande distribution. Ce mode de production agricole industrielle, comme nous pouvons aujourd’hui le constater, est destructeur de l’environnement, maltraitant pour les animaux, fait disparaître les savoir-faire artisanaux et place au second rang le goût des produits. Ce système contribue aussi à la disparition des petits et moyens producteurs, par des marges qui les écrasent, comme l’actualité nous l’a rappelé récemment avec la crise du lait et celle de l’élevage.
Nécessité aujourd’hui de repenser nos modes de consommation et de refaire du lien entre les territoires ruraux et urbains, de nous reconnecter avec ceux qui produisent notre alimentation et nous nourrissent, comprendre leurs contraintes, notre interdépendance, encourager un mode de production agricole différent, préserver les terres agricoles.
Pour ce faire, le concept de « halle alimentaire » du 10e a aussi une dimension d’éducation populaire. Une association, Les Tambouilles, a été créée récemment par des consommateurs de Kelbongoo avec pour but de ménager des espaces de rencontre et d’échange autour des thématiques de l’alimentation et de l’agriculture entre personnes issues de milieux sociaux différents et entre producteurs et consommateurs, mais aussi de susciter des interrogations sur notre système agro-alimentaire. Il s’agira pour cette association de mener des activités du type visites de ferme, ateliers de cuisine, débats, etc… en particulier dans le 10e.
Dans le cadre de la halle alimentaire, nous allons dans un premier temps ouvrir notre boutique d’épicerie tous les samedis, dès ce samedi 14, et accueillir les personnes du quartier qui souhaiteraient avoir davantage d’informations sur le projet. Nous avons pour objectif de démarrer la distribution des produits frais dans les semaines qui viennent.

Remerciements

J’aimerais tout d’abord remercier l’ensemble de l’équipe de Kelbongoo, ses 21 salariés, qui permettent au quotidien, chacun dans son métier, de fournir les habitants du 20e en produits frais depuis plus de quatre ans maintenant et qui va fournir aujourd’hui les habitants du 10e. Notre équipe travaille très dur, notamment dans le secteur difficile qu’est la logistique, avec l’ouverture de notre entrepôt cet été, afin, entre autres, de pouvoir fournir cette halle alimentaire.
J’aimerais remercier les consommateurs fidèles qui nous suivent pour certains depuis quatre ans.
J’aimerais remercier les 50 producteurs avec qui nous travaillons et qui nous font confiance, depuis plusieurs années déjà, pour vendre leurs produits et valoriser leur travail et dont plusieurs sont parmi nous aujourd’hui.
J’aimerais remercier la Mairie de Paris qui a prévu de nous verser une subvention en décembre dans le cadre du budget participatif et qui a financé Paris Habitat pour réaliser les travaux de ce local dans le cadre de l’expérimentation de la halle alimentaire. Je m’excuse d’avance de ne pas pouvoir citer toutes les personnes qui nous ont soutenu pour la réalisation de ce projet, mais j’aimerais en particulier remercier Rémi Féraud, maire du 10e, Didier Le Reste, élu PCF-Front de Gauche du 10e ainsi que sa collaboratrice Juliette Ryan, qui nous ont soutenu depuis le début pour la réalisation de ce projet, ainsi que les élus EELV du 10e.
J’aimerais remercier le collectif Stopmonop et en particulier Erika Abrams, qui se sont battus contre l’installation d’un Monoprix dans ces locaux depuis 5 ans et qui ont déposé le projet de halle alimentaire avec succès au budget participatif de 2016, nous permettant d’obtenir les fonds qui vont nous être versés.
Enfin, j’aimerais remercier Paris Habitat pour la réalisation des beaux travaux dont nous voyons le résultat aujourd’hui.

Contrairement aux usages protocolaires, Léa m’a ensuite passé le micro pour que je dise, au nom du collectif, un mot au sujet de la mobilisation citoyenne qui a abouti à l’installation d’une « halle alimentaire » à la place du DailyMonop’ initialement prévu à l’angle Bichat-Temple et qu’on nous présentait encore en 2013 comme un projet bouclé sur lequel il n’était pas question de revenir. Le discours, improvisé, a été interrompu à mi-parcours par Rémi Féraud, qui m’a accusée de vouloir transformer l’inauguration en « meeting politique ». J’en consigne ici les bribes. Bribes d’abord de ce qui a pu être dit :

L’histoire de notre combat ne peut pas se raconter en deux mots ou en deux minutes. Je me bornerai donc à en marquer quelques jalons, en commençant par où Léa a terminé : les remerciements.
Un grand merci d’abord à Amélie Ragueneau, Sonia Duhalde, Lucy Amado et les commerçants du quartier qui ont lancé, en mai 2011 (il y a six ans et demi) une première pétition papier « Contre le DailyMonop’ et pour la diversité commerciale ». Sans leur initiative, nous ne serions pas là ce soir. Mais aussi sans le long chemin, pas toujours facile, qui a suivi, avec
– encore trois pétitions (la dernière en date lancée le 15 juillet dernier)
– trois questions de pré-Conseil posées en Conseil d’arrondissement du 10e
plusieurs plénières du Conseil de quartier Saint-Louis / Faubourg du Temple
– des sondages, des tractages, des affichages et des rassemblements à l’angle Bichat-Temple
– des échanges avec les élus (non sans frictions, malgré le beau consensus qu’exprime cette cérémonie)
– et enfin un appel à candidatures, lancé conjointement par la Mairie et le bailleur, en tenant compte de la consultation des habitants et en incluant des habitants dans le jury (procédure qui aura encore un épilogue dans les prochains jours pour l’attribution du lot n° 1 suite au désistement du candidat retenu en 2015).
À remercier aussi, ceux qui ont été nos principaux interlocuteurs pour faire lever les blocages successifs :
– Léa Vasa, Sylvain Raifaud et Dante Bassino, trois jeunes maires-adjoints du10e
– Ian Brossat à l’Hôtel de Ville
– Stéphane Bettiol chez Paris Habitat
– enfin Didier Le Reste et les élus PC qui ont pris la relève depuis le vote de la délibération « Les Quatre Saisons Solidaires » en Conseil de Paris en juillet 2016.
À l’antipode de toute la logique de la grande distribution, la « halle alimentaire » portée par Kelbongoo représente notre victoire la plus emblématique. Mais notre combat ne s’arrête pas là et s’insère dans un contexte plus vaste :
1° plus vaste en ce sens que les Parisiens, des quartiers populaires ou « en transition » vers une gentrification subie, sont de plus en plus nombreux à se regrouper et, prenant au mot ceux qui leur parlent de « démocratie participative » et de « co-construction », à revendiquer – pour des raisons qui ne sont pas étroitement égoïstes, mais de principe – une part concrète aux décisions concernant leur cadre de vie (au-delà des premiers pas timides du budget participatif, dont les participants ont souvent l’impression d’être bien plutôt dépossédés de leurs « idées » qu’intégrés au processus décisionnel) ; de plus en plus nombreux à s’opposer à la mainmise de la grande distribution sur le tissu commercial parisien, aux logiques spéculatives qui la sous-tendent et s’expriment, par ailleurs, à travers la privatisation croissante de l’espace et des équipements publics.

C’est au milieu de l’évocation de quelques autres mobilisations citoyennes dont la lutte rejoint la nôtre (le collectif Ramponeau, pour la sauvegarde de l’artisanat à Belleville ; l’association Carton Rouge, contre le Carrefour de 1950 m2 annoncé au 94 avenue Gambetta et l’opération financière qui a permis à la multinationale de l’agro-alimentaire Cargill d’encaisser une plus value de 50 millions aux dépens des contribuables ; le groupe des 24.000, opposé à l’opération spéculative de la banque d’investissement Blackstone créant dans le 3e arrondissement 24.000 m2 de bureaux inutiles aux dépens du logement social ; le collectif Maison de l’Air, opposé à la privatisation du pavillon en haut du parc de Belleville au bénéfice d’un bar branché ; les deux péniches culturelles du bassin de la Villette, chassées au profit d’un Carrefour flottant et d’une antenne de la grande surface culturelle qu’est la Bellevilloise sous prétexte de rentabilité ; les défenseurs des terres agricoles du Triangle de Gonesse, etc. – voir la page Pétition de ce blog) que les politiques ont perdu patience et que Rémi Féraud m’a assez brutalement coupé la parole, malgré les sympathies manifestes de la salle. Suivent donc les bribes de ce qui n’a pas pu être dit :

2° plus vaste, le contexte l’est aussi par les visées de notre action (remise en question de la politique de financement du logement social par les loyers excessifs demandés pour les locaux d’activité en rez-de-chaussée des résidences HLM, qui font le jeu de la spéculation immobilière et contribuent à fermer la presque-totalité du tissu commercial parisien aux ménages à revenus modestes) et par ses acquis :
création en septembre 2015 de la Commission extramunicipale sur le commerce et l’artisanat ; et
– inclusion de la rue du Faubourg du Temple dans l’opération Vital’Quartier 2 de la Semaest
(deux outils donc d’une possible participation citoyenne – tout dépendra de ce qu’on réussira à en faire avec les élus).

Le contexte dans lequel se place l’inauguration de la première halle alimentaire parisienne est, cela dit, à tout prendre assez sombre, avec
– les suppressions d’emplois aidés qui mettent en péril de nombreuses associations engagées dans la voie d’une transition alimentaire (dont, près de chez nous, la Petite Rockette, ressourcerie du 11e arrondissement, très active dans la collecte et le recyclage des invendus) ;
– l’orientation donnée aux états généraux de l’alimentation, qui semblent vouloir avant tout sauvegarder l’agriculture intensive et les modes de consommation qui vont avec, quitte à creuser encore les inégalités, sans véritable remise en cause du modèle américain qui nous mène dans le mur ;
– le vague qui entoure le dispositif des « Quatre Saisons Solidaires » (inégalité de traitement des deux expérimentations [celle du 14e, favorisée, étant plutôt un chantier d’insertion qu’une « halle » au sens de la délibération de juillet 2016] ; aucune vision de ce qui suivra l’actuelle phase expérimentale, dont les critères d’évaluation et la durée même restent indéfinis) ;
– la baisse des APL, supportée surtout par les bailleurs sociaux qui, fragilisés ainsi, seront plus que jamais tentés de faire de leurs locaux d’activité une variable d’ajustement au préjudice à la fois de la vie associative et de l’ESS ;
– l’étrange intérêt manifesté ces derniers temps par les Renseignements généraux pour des structures comme Stopmonop ou la Petite Rockette.

Malgré tout cela, nous espérons que Kelbongoo sera non seulement une belle réussite dans sa tâche de mettre une alimentation saine à la portée de tous, contribuant par son succès à la pérennisation et à l’extension du dispositif des « Quatre Saisons Solidaires », mais deviendra aussi, par son volet social, un foyer de l’activisme citoyen dans le quartier.

Ont suivi des discours d’Olivia Polski, Didier Le Reste et Rémi Féraud. Nous reproduisons celui de Didier Le Reste, très actif ces derniers mois pour faire respecter le vote des habitants du 10e au budget participatif 2016 en faveur de la « halle alimentaire » :

Tout d’abord je tiens à saluer chaleureusement l’engagement de Léa Barbier et Richard Fielding, cofondateurs de Kelbongoo, pour faire vivre ce beau projet.
Nous avons surtout lors des derniers mois eu l’occasion de travailler avec Léa, et avons essayé, autant que faire se peut, de les accompagner dans le développement de leur projet.
Mais je connais également l’importance des enjeux de logistique et d’acheminement qui sont traités en grande partie par Richard Fielding.
Le travail qu’il réalise va bien au-delà d’une démarche entrepreneuriale classique, il s’agit ici d’un engagement profond, menant, si je comprends bien, à passer des journées longues, dans l’entrepôt, dans les lieux de distribution, chez les producteurs et derrière un bureau. Pour une richesse qui est celle du plaisir du travail bien fait, plutôt que d’un compte en banque bien rempli.
En appui de la mobilisation du quartier, le soutien de tous les différents partenaires présents a été indispensable, même si on aurait pu éviter certains blocages, mais sans votre détermination, et votre pugnacité à porter ce projet, innovant, original et novateur, nous n’aurions pas le plaisir d’être réunis ce soir.
C’est un projet, et le nombre de présents ce soir en témoigne, qui répond à une vraie aspiration populaire et à ce que portent nombre d’entre nous.
Les communistes ont porté dans le cadre de la campagne des municipales de 2014 une proposition, celle de développer à Paris des Halles alimentaires, lieux de vente en circuit court, à des prix accessibles à tous les Parisiens, tout en garantissant une juste rémunération des producteurs.
Cela fait écho à l’initiative, co-organisée entre le syndicat agricole le MODEF et le PCF tous les ans place de la Bastille, de vente de fruits et légumes à prix coûtant, pour montrer qu’il est possible de développer des modèles alternatifs à la grande distribution, au bénéfice tant du consommateur que du producteur.
Cette proposition est ensuite devenue un engagement de la mandature.
En ce sens, Nicolas Bonnet, Président du groupe communiste, dont je salue la présence ici ce soir, a sollicité dès 2015 la réalisation d’un rapport sur le sujet par l’Inspection générale de la Ville de Paris. Travail de qualité, qui a permis de mettre en lumière les risques et les difficultés à mettre en œuvre ce type de projet.
Puis, en juillet 2016, à la lumière de cette expertise, le groupe communiste a proposé une délibération sur les Halles alimentaires, qui a été adoptée à l’unanimité du Conseil de Paris. Ce vote a lancé la démarche avec un dispositif intitulé « Les Quatre Saisons Solidaires », et a acté le lancement de deux expérimentations, une dans le 14e arrondissement et une dans le 10e.
L’objectif de ce projet a déjà été bien expliqué par Léa Barbier, il s’agit à la fois de se soucier de la situation des producteurs agricoles, qui trop souvent ne peuvent vivre décemment de leur labeur, et des conditions dans lesquelles ils travaillent, de l’impact sur l’environnement et sur l’emploi. Il s’agit de construire un projet qui soit viable et acceptable et bénéfique pour tous, producteurs et consommateurs et politiques, parce qu’il répond à la fois aux enjeux environnementaux, de développement durable, de santé publique et de qualité de vie.
La démocratisation de l’accès de tous à une alimentation de qualité est au cœur de ce projet. Et cela passe en premier lieu par un prix accessible. C’est la condition nécessaire, mais pas suffisante. En effet, si nous voulons que l’accès à une alimentation de qualité soit réellement approprié par toutes et tous, c’est aussi d’une démarche proactive, d’éducation populaire que nous avons besoin. La Ville y participe directement avec Paris Santé Nutrition, mais nous avons besoin de relais sur ces sujets, qui soient directement dans les quartiers au quotidien et qui proposent une vraie alternative.
C’est pourquoi j’en profite pour saluer le lancement de l’association « Les Tambouilles », qui va pleinement pouvoir s’impliquer dans ce rôle, en développant les activités proposées, par exemple de visites de fermes, d’ateliers cuisine etc.
C’est un projet qui a été en gestation pendant de nombreux mois qui aboutit aujourd’hui, c’est un projet ambitieux, puisqu’il s’agit de proposer un modèle alternatif, c’est un projet expérimental, qui a vocation à susciter des doutes, des interrogations, et des ajustements si nécessaires, et c’est un projet innovant, qui suscite donc aussi l’intérêt du plus grand nombre.
Je suis donc particulièrement heureux que nous puissions ensemble inaugurer ce lieu, a fortiori puisque nous sommes situés dans un quartier populaire de Paris.
Dans une période où l’État rogne sur les contrats aidés pour les associations, mettant à mal certaines d’entre elles après qu’il a diminué les crédits pour la politique de la Ville en 2017, il est plus important que jamais que la Ville de Paris continue de soutenir des projets ambitieux au cœur des quartiers populaires au bénéfice de tous les Parisiens.

Le samedi 14, dans le cadre de son compte rendu de mi-mandat, Anne Hidalgo, toujours sous l’éblouissement de ses JO, n’a pas jugé utile de communiquer au sujet du commerce parisien ou de la transition alimentaire.
Partie remise ? Difficilement, sans une remise en question des priorités de ceux qui nous gouvernent, à même de garantir que la belle initiative de Kelbongoo rue Bichat ne soit pas que l’exception qui confirme la règle d’une « réussite » sans autre critère que l’argent.